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L’inclusion numérique des publics vulnérables

12 novembre 2020

Sous l’effet de l’épidémie de Covid-19 et du confinement, nous avons assisté à l’accélération de la transformation numérique. De nouvelles habitudes de travail ont émergé avec la mise en place du télétravail à temps plein pour de nombreux actifs. Les modes de consommation ont également évolué avec l’adoption par de nombreux commerces de proximité de services innovants comme le click-and-collect. Cependant, le numérique concerne bien d’autres aspects de notre vie quotidienne : démarches administratives dématérialisées, interactions sociales, accès aux loisirs… S’intéresser au numérique, c’est aussi s’interroger sur la capacité des individus à trouver leur place dans une société qui se numérise un peu plus chaque jour. Quel accompagnement est proposé aux personnes qui se sentent en difficulté avec les outils numériques ? Comment mettre le numérique au service des publics vulnérables ? Abylon s’intéresse aujourd’hui à la fracture numérique et aux initiatives qui visent à rendre le numérique plus inclusif.

 

Fracture numérique : de quoi et de qui parle-t-on ? 

La fracture numérique ne réside pas seulement dans une difficulté d’accès aux équipements. En réalité, elle est surtout liée aux usages, comme l’a souligné l’émergence de la notion d’illectronisme. Lorsque l’on parle de fracture numérique, on pense spontanément aux personnes âgées. Or, les seniors sont loin d’être les seuls à rencontrer des difficultés dans l’accès au numérique. Ainsi, 17% des 12-17 ans disent se sentir peu ou pas compétents pour utiliser un ordinateur.  En revanche, on remarque des disparités liées au niveau de diplôme de la population. Plus de 70% des personnes titulaires d’un diplôme du supérieur et/ou à hauts revenus considèrent que le numérique a un impact positif sur leur quotidien. Un chiffre qui tombe à 42% chez les personnes non diplômées, les plus enclines à abandonner des démarches en ligne si elles ne sont pas accompagnées.

 

Le numérique : un frein qui peut se transformer en levier d’insertion 

Si le numérique facilite l’accès à une multiplicité de supports, par exemple pour effectuer des démarches en ligne, il n’a pas toujours été synonyme d’une réelle simplification des contenus, ni d’une communication repensée autour des services existants. En l’absence de contact humain et face à la standardisation de la prise en charge, certains usagers des services publics se sentent désorientés. Une situation qui les conduit parfois à renoncer à l’exercice de leurs droits.

Or, à l’heure actuelle, le numérique peut aussi être porteur d’opportunités. Des opportunités économiques d’abord, puisque maîtriser les outils et usages numériques est vecteur d’opportunités professionnelles. Il est porteur d’opportunités sociales par la simplification de l’accès aux démarches et en permettant de faire des rencontres par exemple. Enfin, les opportunités offertes par le numérique sont aussi culturelles : il donne accès à une multitude de contenus informationnels ou récréatifs. Le numérique met à portée de clic une volume important d’informations et d’activités, à un coût modéré, où que se trouve l’utilisateur. En cela, il constitue un puissant levier d’insertion.

 

Le numérique inclusif : où en est-on ? 

De nombreuses initiatives en faveur d’un numérique inclusif ont vu le jour au fur et à mesure de la dématérialisation des démarches. Elles reposent toutes sur un élément central : l’accompagnement des publics en difficulté.

Un écosystème qui s’est construit par des initiatives locales. L’accompagnement proposé aux publics en difficulté avec le numérique est varié. Il va de la mise à disposition de matériel à la formation en passant par l’aide ponctuelle à la réalisation de démarches. Des nombreux acteurs ont développé des initiatives en ce sens :

  • Les collectivités territoriales : avec l’ouverture de lieux dédiés à l’accompagnement comme les maisons de services publics, les collectivités territoriales sont allées au-devant des usagers pour leur offrir un accompagnement à la réalisation de leurs démarches en ligne. Les maisons de services publics sont appréciées des citoyens : 40% d’entre eux les considèrent aujourd’hui comme un lieu idéal pour se former ou réaliser des démarches en ligne.
  • Les établissements publics : pour accompagner les usagers dans leurs démarches en ligne, certains établissements publics ont développé une offre de service spécifique. C’est le cas de la Caisse d’Allocations Familiales de Seine-Saint-Denis, qui a formé ses 55 accompagnateurs. Ceux-ci reçoivent les bénéficiaires dans un espace individuel pour les former à l’utilisation des téléprocédures.
  • Les organismes de formation : certains d’entre eux proposent des sessions de formation au numérique pour tous.
  • Les associations : elles portent des initiatives variées et ouvrent parfois des tiers-lieux dédiés. Ainsi, Emmaüs Connect agit pour un numérique inclusif par la transmission de connaissances afin d’en faire un levier d’insertion économique et sociale.

Au-delà de ces acteurs identifiés, on retrouve aussi de très nombreux aidants, souvent issus du cercle familial ou amical des personnes en difficulté.

Une stratégie nationale pour favoriser la coordination

Avec l’objectif affiché de “relever le défi de l’illectronisme” et d’inclure l’ensemble des citoyens dans la transformation numérique en cours, l’État a lancé en 2018 un Plan national pour un numérique inclusif. Avec ce plan, l’État cherche à garantir l’égalité d’accès des citoyens aux services publics en favorisant la coordination des différents acteurs de la médiation numérique. Pour cela, c’est une stratégie de long terme qui a été choisie. En effet, l’aide d’urgence apportée à un usager pour effectuer une démarche en ligne a vocation à faire valoir un droit, obtenir une allocation ou encore éviter une pénalité. C’est bien souvent une aide ponctuelle, avec un aidant qui “fait à la place” de la personne concernée. L’inclusion numérique constitue l’étape suivante : rendre les usagers autonomes dans l’utilisation des services et outils numériques. Il s’agit de les accompagner en s’appuyant sur un aidant numérique régulier pour viser une appropriation des outils.

Afin d’inciter les publics concernés à se former, un Pas numérique a été mis en place. Il peut être utilisé pour différents types de formation, en fonction des besoins de chacun. Du côté des structures de médiation numérique, des Hubs France Connectée ont été mis en place depuis 2019. Ils ont pour mission de mettre en réseau les aidants numériques sur les territoires afin de renforcer l’impact de leurs actions. Ces Hubs associent des acteurs publics, privés et associatifs qui définissent des offres de services en fonction des spécificités de chaque territoire et des besoins des usagers.

 

Les collectivités territoriales : des acteurs essentiels pour un numérique plus inclusif

Alors que le confinement a donné un coup d’accélérateur à la numérisation de la société, le Sénat a publié un rapport sur la lutte contre l’illectronisme et pour l’inclusion numérique le 17 septembre 2020. Ce rapport réaffirme la nécessité de donner un rôle de premier plan aux collectivités territoriales pour obtenir des résultats probants en la matière. En effet, certains dispositifs comme le Pass Numérique ne sont pas encore déployés sur l’ensemble du territoire. Or, les collectivités territoriales sont très bien placées pour identifier les besoins des usagers et proposer des solutions d’accompagnement efficaces.

Chez Abylon, nous sommes convaincus que l’inclusion numérique constitue une priorité car, si elle a un coût, ses gains peuvent être importants. Il nous semble nécessaire d’introduire une réflexion sur le numérique inclusif et sa prise en charge dans les processus de dématérialisation des établissements publics et des collectivités territoriales. C’est pourquoi, dans nos missions, nous portons une attention particulière à l’expression des besoins de chaque partie prenante. Pour faire du numérique un vecteur d’inclusion et de simplification, et non l’inverse.