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Civic tech : donner la parole aux jeunes pour construire la ville

07 mai 2020

L’idée d’associer les jeunes à la vie publique n’est pas nouvelle. De nombreux territoires comptent des conseils municipaux ou départementaux de jeunes, des visites d’élus sont régulièrement organisées dans les écoles, de même que des défis jeunes ou encore des modules d’éducation civique. Pourtant, aujourd’hui, 46% des 18-35 ans estiment que d’autres systèmes politiques sont tout aussi bons que la démocratie. Une forte proportion des jeunes européens estime en outre que voter ne sert à rien. Dans ces conditions, comment associer durablement les jeunes à la construction de la ville pour répondre à leurs besoins ? Comment cultiver chez eux l’envie de participer à la vie de la cité ? Les civic tech constituent un levier puissant à actionner pour inciter les jeunes à s’impliquer dans la vie publique.

Les civic tech : une forme d’engagement qui ressemble aux jeunes
Les civic tech introduisent les technologies de l’information et de la communication dans la sphère de l’engagement citoyen. En utilisant des codes de communication proches de ceux des jeunes et leurs canaux, notamment les réseaux sociaux, elles ont une capacité à les toucher plus importante que les méthodes traditionnelles Elles simplifient l’implication sur des sujets politiques en proposant des actions rapides (votes en ligne…). Les civic tech mettent au service de l’action publique, militante,associative ou médiatique des moyens numériques avec lesquels les jeunes se sentent à l’aise. Par exemple, le media indépendant Voxe.org propose un comparateur de programmes électoraux permettant de se forger une opinion sur une plateforme unique. Les civic tech sont par ailleurs une industrie qui se penche sur des problématiques importantes pour les jeunes les plus engagés : relations politiques plus horizontales, démocratie directe ou encore services digitaux open source, à l’instar de Open Source Politics, qui repose sur un logiciel libre d’abord développé pour la ville de Barcelone.

Favoriser l’engagement citoyen et cultiver les valeurs démocratiques chez les jeunes
Participer et se faire entendre est une condition essentielle à l’insertion dans la vie de la cité. De nombreux jeunes ont le sentiment de ne pas en savoir assez pour se forger une opinion. C’est d’ailleurs une des raisons pour lesquelles ils ne prennent pas part à la vie politique locale. Or, cela prive les territoires d’une bonne compréhension de leurs besoins. En s’appuyant sur les civic tech pour connaître leurs demandes, les collectivités territoriales se donnent les moyens de dessiner une politique de la jeunesse au plus près de ses bénéficiaires. Le Conseil départemental de l’Aude a ainsi mis en place une plateforme participative en complément du Conseil départemental de jeunes. Le but : favoriser la remontée d’idées pour inspirer les élus. D’autres acteurs ont développé des offres pour répondre au sentiment d’incompétence que ressentent de nombreux jeunes en matière de politique. C’est le cas par exemple des décryptages d’Accropolis, un média en ligne qui décortique en direct les questions au gouvernement du mercredi. Ce média interagit avec ses spectateurs sur le réseau social Twitch, traditionnellement utilisé pour le streaming de jeux vidéo. Les jeunes peuvent donc poser leurs questions pour mieux comprendre ce qui se joue à l’Assemblée nationale ou au Sénat.

Rétablir la confiance des jeunes dans la vie publique et la politique locale
En 2018, un sondage de la Fondation Jean-Jaurès et de l’Institut Ifop mettait en avant que 28% des 18-24 ans adhéraient à au moins 5 thèses conspirationnistes. En comparaison, ce chiffre est de seulement 9% chez les 65 ans et plus. Une des explications de ce phénomène se trouve peut-être dans le fait que de nombreux jeunes s’informent sur la politique à travers des partages de vidéos et des posts choc sur les réseaux sociaux. À l’opposé, les plateformes de civic tech affichent une volonté de neutralité. En donnant accès à des faits, ces plateformes cherchent à donner à leurs utilisateurs les moyens de se forger une opinion éclairée. C’est également pour lutter contre le scepticisme autour de l’information publique que de nombreuses villes ouvrent leur données. Elles donnent ainsi aux citoyens la possibilité de se renseigner à la source.

Les civic tech sont-elles vraiment représentatives ?
Les civic tech ne remplacent pas la politique locale mais elles contribuent à l’ouvrir à de nouveaux publics. Cependant, elles se heurtent également à des enjeux d’inclusivité. Ainsi, les dispositifs de participation en ligne reposent souvent sur l’écrit, un mode d’expression avec lequel beaucoup ne sont pas à l’aise. Les civic tech ne permettent pas non plus de lutter contre les fractures numériques et sociales, alors même que 17% des 12-17 ans se sentent peu ou pas compétents pour utiliser un ordinateur. Avec 15% des français qui n’ont pas accès à Internet, les consultations en ligne ne peuvent pas, pour le moment, être complètement démocratiques. Il apparaît alors nécessaire d’aller chercher les jeunes pour les inciter à participer. Sinon, les civic tech risquent de se transformer en “bulle” et de se contenter de toucher une cible déjà atteinte : les jeunes citadins diplômés.