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Comment la résilience s’installe dans l’espace public

07 avril 2021

La crise sanitaire liée au Covid-19 a eu et continue d’avoir un fort impact sur notre quotidien. Même si de nombreuses activités sont désormais effectuées à distance, des transformations apparaissent aussi au plus près de chez nous. L’espace public urbain a connu des évolutions pour répondre aux besoins nouveaux qui ont émergé avec la crise sanitaire. De nombreuses pistes cyclables ont ainsi été créées (désormais surnommées les coronapistes), des rues sont devenues piétonnes, les restaurants et bars qui n’avaient pas de terrasses ont pu en aménager sur les trottoirs. Ce sont autant d’exemples d’actions de résilience territoriale, c’est-à-dire des actions qui contribuent à aider le territoire à résister à un choc inhabituel et à rebondir. Mais répondent-elles à des besoins plus profonds, au-delà de la crise sanitaire ? Quelles sont les leçons de cette crise pour que la résilience s’installe durablement dans la fabrique urbaine ? Le tour d’horizon d’Abylon.

 

Le nouveau visage de la résilience 

Des initiatives visant à rendre l’espace urbain plus résilient ont été mises en place bien avant la crise liée au Covid-19. Les places piétonnes ont par exemple été protégées par des blocs de béton dans le cadre du plan Vigipirate. De même, des maisons ou des quartiers ont été surélevés pour faire face aux risques de crues. Mais on remarque que les installations éphémères mises en place sous l’effet de la crise sanitaire actuelle montrent un autre visage de la ville résiliente.

Alors que les premiers exemples d’urbanisme résilient ont plutôt érigé des barrières, la ville résiliente d’aujourd’hui s’appuie sur des espaces urbains flexibles. Elle est pensée autour de la sociabilité, de la proximité et des mobilités douces. Les connexions entre les citoyens et les comportements en faveur de la transition écologique sont au centre de cette nouvelle démarche de résilience.

 

Une approche novatrice de la ville 

La crise liée au Covid-19 a clairement montré le poids de l’espace public dans la qualité de vie des citadins. C’est la modularité des espaces qui a rendu la ville plus vivable pendant la crise malgré les contraintes de la distanciation sociale, renforçant des tendances déjà présentes. Avec deux conséquences sur l’urbanisme :

  • Une nouvelle façon de penser l’espace public: les trottoirs ont été réinvestis comme des lieux de vie plutôt que comme de simples lieux de passage ou de stationnement des véhicules. Ils se sont transformés en espaces de jeu pour les enfants ou en espaces de sociabilité pour les adultes, par exemple avec les terrasses éphémères.
  • Moins de voitures, plus de mobilités douces : cette évolution s’est matérialisée par le développement de pistes cyclables et des mobilités douces en général. Le vélo est devenu un mode de transport privilégié car il permet de respecter plus facilement les règles de distanciation sanitaire. Grâce à un simple coup de peinture pour dessiner de nouvelles voies, le transport multimodal s’est imposé dans la ville. La mairie de Nantes a par exemple créé 21 km de voies cyclables, la ville de Paris 50 km. L’offre s’est améliorée en longueur comme en largeur : la transformation en voie cyclable géante de la rue de Rivoli, à Paris, est ainsi devenue un des symboles du déconfinement. Des équipements qui favorisent aussi la transition écologique.

 

Vers la ville du quart d’heure 

La crise sanitaire a montré la rareté de l’espace public dans les grands centres urbains. Les confinements successifs et la massification du télétravail ont quant à eux favorisé la proximité et la vie de quartier. Une évolution qui met à mal la division traditionnelle entre hypercentre commercial et quartiers résidentiels. Si la réduction des trajets quotidiens a pour effet d’atténuer l’empreinte carbone de chacun, elle pose aussi la question de l’aménagement de la ville. Aujourd’hui, l’activité économique n’a plus besoin d’être concentrée en centre-ville. Dans cette nouvelle ville à échelle humaine qui se dessine, les habitants auront besoin de trouver une réponse à leurs besoins à une distance raisonnable de leur domicile.

C’est ce que l’urbaniste Carlos Moreno a nommé la “ville du quart d’heure”, une ville dans laquelle chacun peut trouver les services dont il a besoin dans un rayon d’environ 15 minutes autour de chez lui. Elle pose aussi la question de la “fluidification des parcours de marche”. À travers ce concept, l’urbaniste de l’Institut Paris Région plaide pour une synchronisation des feux de circulation qui contribuerait à simplifier les trajets effectués à pied. Il va aussi plus loin, en proposant une mutualisation plus poussée de l’espace, à l’image d’une expérimentation menée en Allemagne : une rue piétonne servant de cour de récréation aux enfants.

Cette nouvelle forme de ville s’appuie sur une mixité des usages, tout en offrant une bonne interconnexion entre les différents quartiers. Une façon de réduire les déplacements non nécessaires et donc d’agir pour la lutte contre le changement climatique, d’offrir une meilleure qualité de vie aux habitants et de renforcer la résilience des villes.