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Les ingrédients d’une démarche d’économie circulaire réussie

08 juin 2020

En 2020, c’est le 22 août que la Terre atteindra son “jour du dépassement”. À cette date, qui survient trois semaines plus tard qu’en 2019 suite aux effets de la crise sanitaire sur les activités humaines, nous aurons utilisé l’ensemble des ressources que la Terre peut générer en une année. Ce chiffre montre à quel point il est nécessaire d’adapter nos modes de production et de consommation pour prendre en compte les ressources dont nous disposons. La notion d’économie circulaire, qui s’impose peu à peu, est une réponse à ce défi. Si ce concept a fait son entrée dans le droit français en 2015, certains territoires s’en sont emparés dès les années 2000. Comment s’en inspirer pour adopter un modèle de développement pérenne et durable ? 

L’économie circulaire : comment ça marche ?

L’économie circulaire est un système économique “3-en-1”. Il vise à augmenter l’efficacité des ressources et à diminuer leur impact sur l’environnement. Pour cela, il s’appuie sur la prise en compte de l’ensemble du cycle de vie des biens et services, tout en cherchant à développer le bien-être des individus.

Son périmètre est large et il recouvre trois domaines :

  • La production de biens et services par les acteurs économiques
  • La demande et le comportement des consommateurs
  • La gestion des déchets, notamment dans une perspective de recyclage et de valorisation

Les collectivités territoriales ont depuis longtemps investi ce dernier domaine, la gestion des déchets faisant partie des compétences traditionnelles des communes. Néanmoins, pour mettre en place une véritable démarche d’économie circulaire, il est nécessaire d’aller au-delà de la simple gestion des déchets et de mettre en place une stratégie globale. En particulier, il s’agit d’intégrer la  question de l’offre des acteurs économiques d’une part, et, d’autre part, celle des comportements des consommateurs sur le territoire.

L’économie circulaire : un cadre législatif récent

Le concept d’économie circulaire est directement inspiré de la théorie dite du “Berceau au berceau”, formulée en 2002. Pourtant, il faudra attendre la Loi de transition énergétique pour la croissance verte du 17 août 2015 pour que cette notion fasse son apparition dans le droit français. Autre jalon : en 2018, le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire présente sa Feuille de route pour l’économie circulaire. Ce document compile 50 mesures autour de la production, de la consommation, du recyclage et de la mobilisation des acteurs pour atteindre une économie 100% circulaire. Les moyens d’action mis en avant sont variés : réglementation, fiscalité, dispositifs de financement portés par l’Ademe, développement d’outils (guides techniques, référentiels de bonnes pratiques)… Avec cette feuille de route, l’État crée les conditions pour faire de l’économie circulaire une réalité au niveau national. Six mois après sa publication, plus de la moitié des collectivités déclaraient être engagées dans une démarche d’économie circulaire. Cependant, à l’échelle locale, si certains territoires ont attendu l’impulsion étatique pour se lancer dans l’économie circulaire, d’autres étaient déjà précurseurs en la matière.

 

Des démarches pionnières nées d’initiatives portées par des acteurs du territoire

Dès le début des années 2000, des initiatives d’économie circulaire ont émergé dans différents territoires. Ces démarches visaient à mieux utiliser les ressources pour diminuer l’impact sur l’environnement, tout en développant l’activité économique et l’attractivité. Initiées très tôt, elles ont un point commun : portées par une mobilisation citoyennes, elles venaient répondre à des enjeux locaux forts, dans une logique bottom-up.

ECOPAL : dans la région de Dunkerque, une démarche centrée autour de l’écologie industrielle . Dans un contexte où l’industrie, colonne vertébrale de l’économie régionale, était menacée, 17 entreprises du territoire se sont fédérées dès 2001 pour créer ECOPAL, une des premières associations d’écologie industrielle en France. L’écologie industrielle consiste à créer des synergies entre différentes industries présentes sur le territoire pour optimiser les flux de matières, d’énergies et de personnes pour un bénéfice à la fois économique et environnemental. L’écologie industrielle a été perçue par les entreprises comme une opportunité pour gagner en performance et en compétitivité. L’association a notamment mis en place un service de mutualisation de services de collecte (DEEE, déchets dangereux…). L’objectif partagé étant de faire de l’Écologie Industrielle et Territoriale (EIT) un véritable levier de différenciation du territoire, favorable à l’attractivité économique et générateur d’emplois locaux, non délocalisables. Pour consolider la démarche, un label a été co-construit avec l’Ademe.

BiovalléeⓇ : dans la Drôme, un éco-territoire agricole abrité par une marque pour préserver la rivière. Au début des années 1990, face aux niveaux de pollution très élevés de la Drôme, des acteurs locaux, publics et privés, s’engagent dans une démarche concertée et innovante de gestion du cours d’eau. L’objectif est de concilier la préservation de la ressource naturelle et de l’activité agricole, indispensable à l’équilibre économique du territoire. En 20 ans, le cours d’eau redevient un espace naturel où la biodiversité s’épanouit et le territoire est un pionnier de l’agriculture biologique. C’est dans ce contexte que naît le projet BiovalléeⓇ, une marque déposée adossée à une association qui contribue à son rayonnement. Tous les acteurs du territoire peuvent y adhérer pour contribuer aux objectifs de l’association fondés sur les principes de l’économie circulaire. C’est grâce à la mobilisation de l’ensemble des acteurs autour du projet BiovalléeⓇ que le territoire a pu développer des activités économiques locales, respectueuses de l’environnement : agriculture biologique, production d’énergie verte, tourisme éco-responsable… L’économie circulaire fait désormais partie intégrante de l’identité du territoire. En 2019, BiovalléeⓇ est lauréat de l’appel à projet de l’État Territoire Innovant de Grande Ambition. Son projet repose sur la coopération entre trois intercommunalités et plus d’une quarantaine d’acteurs du territoire.

 

Que retenir de ces initiatives ?

L’économie circulaire ne doit pas être considérée comme une contrainte. Au contraire, c’est une opportunité de répondre aux enjeux du territoire en s’appuyant sur ses propres ressources pour concilier économie et environnement. La collectivité apporte son soutien pour fédérer les acteurs, offre des conditions de développement propices, elle est le porte-parole de l’initiative auprès d’autres territoires et des institutions nationales. En somme, et c’est l’une de nos convictions chez Abylon, l’action de la collectivité est porteuse de succès à la condition de s’appuyer sur les initiatives des acteurs du territoire.

 

Les 3 facteurs de succès d’une démarche d’économie circulaire

  • Réaliser un diagnostic approfondi sur les trois domaines de l’économie circulaire

Grâce au diagnostic, les collectivités ont les moyens de mieux comprendre où elles en sont en matière d’économie circulaire. En général, la gestion des déchets est déjà bien investie. S’il est nécessaire d’élargir le périmètre d’action, le diagnostic donne les clés pour identifier les filières stratégiques pour le territoire.

  • Adapter l’organisation pour assurer la transversalité de la démarche 

L’économie circulaire, de par ses enjeux, implique de traiter ces sujets de façon transverse et sur le long terme. Le portage politique est la condition essentielle de réussite. Il est indispensable de traduire ce soutien des élus dans la gouvernance de la démarche d’économie circulaire pour lui donner de la crédibilité et mettre en mouvement l’ensemble des parties prenantes. Quelle que soit l’organisation choisie, il convient de lui donner de la visibilité pour qu’elle soit identifiée par tous les services de la collectivité. Leur implication étant une des clés du succès de la démarche d’économie circulaire, les inviter à la co-construire grâce à des méthodes d’intelligence collective constitue un levier important pour susciter leur adhésion et les mobiliser au-delà des silos de l’organisation.

  • Penser “amélioration continue” dès la phase de conception du projet

Penser sa démarche d’économie circulaire comme une démarche d’amélioration continue implique de se doter non seulement d’une stratégie et d’un plan d’actions, mais aussi d’outils. L’organisation mise en place doit intégrer la révision régulière des impacts et la mise à jour en conséquence. C’est dans ce sens que l’Ademe a développé, entre 2017 et 2019, le référentiel d’actions économie circulaire. Co-conçu avec des collectivités pilotes, il constitue un outil précieux pour mettre en place une démarche d’économie circulaire ambitieuse, adaptée au territoire et la faire évoluer sur le long terme.