Depuis quelques années, l’agriculture urbaine connaît un boom. Cette pratique consiste à développer une production alimentaire en ville, parfois complétée par l’élevage de petits animaux comme des poules ou des lapins. La ville de Paris s’apprête ainsi à accueillir la plus grande ferme urbaine au monde. Celle-ci ouvrira ses portes au printemps 2020, sur le toit du Parc des Expositions. Sur une superficie de 15 000 m2, une vingtaine de maraîchers pourront y produire jusqu’à une tonne de fruits et légumes en haute saison. Abylon se penche sur ce phénomène en pleine expansion : comment cette agriculture de proximité réinvente-t-elle la ville ?
La résurgence de l’agriculture en milieu urbain
Jusqu’au XIXe siècle, les villes entretenaient une relation privilégiée avec leur arrière-pays vivrier. Sous l’effet de la mécanisation agricole et de l’urbanisation croissante, ce lien s’est progressivement distendu : de nos jours, l’autonomie alimentaire des villes est de l’ordre de 2%. C’est dans ce contexte que l’on assiste à la résurgence de l’agriculture urbaine. Elle devient un outil au service de la résilience des territoires. Reverdir les villes répond à des enjeux liés au dérèglement climatique : stockage du carbone dans les sols, régulation de la température ambiante, relocalisation de la production pour réduire les transports avec un mode de production dédié à la consommation en circuits courts. Les projets d’agriculture urbaine sont aussi nombreux que divers mais il est possible de distinguer deux grands modèles : les potagers urbains et les usines agricoles.
Les potagers urbains : concilier développement urbain et qualité de vie
À l’heure actuelle, l’agriculture urbaine ne permet pas d’assurer la sécurité alimentaire des villes à elle seule. Mais, en étant une force d’appoint pour l’agriculture rurale, elle retisse des liens entre les citadins et la terre. De nombreux jardins partagés fleurissent partout en France. En travaillant la terre, c’est aussi le lien social que ces espaces à visée solidaire ou pédagogique renforcent. Ils permettent de se retrouver autour d’un projet partagé. Au-delà de l’aspect humain, ces jardins partagés ou espaces végétalisés accompagnent la transition écologique de la ville : ils enrichissent la biodiversité, participent à la diminution des émissions de CO2 et permettent à des populations diverses d’expérimenter des modes de vie plus sains. De leur côté, les collectivités territoriales peuvent, grâce à la collecte de données, analyser ces pratiques pour optimiser l’aménagement urbain en fonction de ces nouveaux usages.
Les usines agricoles : l’agriculture intensive dans la ville
Les usines agricoles proposent quant à elles une agriculture urbaine fondée sur des innovations techniques. Face à un prix du foncier élevé, la culture au sol peine à trouver sa rentabilité économique en ville. La culture verticale s’impose comme la seule solution viable en termes de rendement aujourd’hui. Des start-ups comme Agricool réinventent la façon de produire en ville. Leur production de fruits et légumes, dans des containers, est pilotée par des capteurs transmettant des données. Par ailleurs, le recours à des serres hydroponiques permet aux cultures d’évoluer hors-sol, sans terre, avec très peu d’eau et des lumières LED. Cette forme d’agriculture urbaine, plus intensive, s’inscrit dans une perspective économique, elle représente un gisement d’emplois potentiel pour les villes.
Multiplier les interactions entre la ville et les fermes urbaines
Les cultures hors-sol et en intérieur permettent de relocaliser la production. Néanmoins, elles perpétuent une production agricole décorrélée des saisons et elles ne participent pas à la préservation de la biodiversité ni au stockage du carbone. L’énergie qu’elles consomment pour la production reste relativement importante. Dans ces conditions, l’avenir de l’agriculture urbaine semble plutôt se trouver dans les synergies qui pourront se créer entre les fermes et leur environnement. C’est le point de départ de la mise en place par Veolia d’une ferme expérimentale de 6000 m2 au Marché d’Intérêt National de Lomme, près de Lille. Cette ferme dédiée au micro-maraîchage bio-intensif selon les principes de la permaculture et de l’éco-culture propose un programme de formation. En partenariat avec une entreprise adaptée, cette ferme a également vocation à créer des emplois solidaires pour des personnes en situation de handicap ou en insertion professionnelle. Une façon de faire germer de nouvelles idées pour la ville de demain.